ADMISSION EN DOCTORAT : l'illégale SUBORDINATION À UN SEUIL MINIMAL DE FINANCEMENT
Une école doctorale n’est pas compétente pour conditionner l’admission en doctorat à la détention d’un seuil minimal de financement. En effet, aucune disposition statutaire ou réglementaire ne prévoyait la possibilité de conditionner l’accès au doctorat à la détention de ressources minimales. De plus, si une école doctorale a le pouvoir de fixer un plafond d’encadrement des doctorants, elle ne peut déléguer cette mission à un collège d’études doctorales.
Dans une décision du 21 novembre 2024, la Cour administrative d’appel de Lyon a ainsi confirmé la position du tribunal administratif de Lyon (Tribunal administratif de Grenoble, 4ème Chambre, 19 octobre 2023, 2104614) au motif que la réglementation des conditions d’accès au doctorat ne prévoit pas que les écoles doctorales puissent exiger des futurs doctorants un montant minimal de ressources et que la réglementation des conditions d’encadrement des doctorants ne peut pas être déléguée à un collège d’études doctorales (CAA Lyon, 6ème ch., 21 novembre 2024, n°23LY03905)
Par cette décision notable, la Cour Administrative d’Appel de Lyon ajoute une garantie supplémentaire pour les droits des doctorants, en ce qu’elle juge recevable le recours en excès de pouvoir contre des dispositions internes d’un règlement intérieur lorsque ces mesures sont impératives.
L’acceptation par le juge du contrôle des MESURES IMPÉRATIVES DANS UN RÈGLEMENT INTÉRIEUR
Par délibération du 8 juin 2021, le conseil du Collège des études doctorales de l'Université Grenoble Alpes a, en application de l'article 20 des statuts de ce collège, approuvé son règlement intérieur.
Deux enseignants-chercheurs ont contesté certaines dispositions du règlement intérieur du Collège des études doctorales de l’Université de Grenoble Alpes, au motif qu’elles fixaient des exigences trop restrictives concernant le financement des études doctorales en dehors du cadre légal national et qu’elles prévoyaient arbitrairement le plafonnement du nombre de doctorants par un directeur de thèse.
Par un jugement du 19 octobre 2023, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé les dispositions contestées, que la délibération du conseil du Collège des études doctorales de l’Université Grenoble Alpes approuvait.
Cette dernière a interjeté appel de ce jugement.
Par une décision en date du 21 novembre 2024, la Cour administrative d’appel de Lyon a jugé recevable la requête des requérants au motif que les dispositions d'un règlement intérieur, bien qu'interne, peuvent faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, si elles contiennent des mesures impératives affectant les droits et obligations des doctorants.
Or, les dispositions en l’espèce constituaient des mesures impératives en ce qu’elles conditionnaient d’une part, l’admission au doctorat à la détention d’un financement dédié et d’autre part en ce qu’elles imposaient aux écoles doctorales, un plafond de doctorants.
La subordination illégale de l’admission en doctorat à un seuil minimal de financement
La Cour administrative d’appel de Lyon a jugé que c’est à bon droit que la juridiction de première instance a annulé l’article 3 du règlement intérieur contesté, relatif à la subordination de l’admission en doctorat à des ressources égales au SMIC.
Pour ce faire, elle a considéré que d’une part, aucune disposition statutaire ou réglementaire ne prévoyait la possibilité de conditionner l’accès au doctorat à la détention de ressources minimales. En effet, l’article 11 de l'arrêté ministériel du 25 mai 2016 ne conditionne pas l’admission et l’inscription en doctorat à un niveau de ressource. Celui-ci prévoit uniquement une vérification par le directeur de l’école doctorale des conditions financières à chaque inscription.
D’autre part, la Cour administrative d’appel de Lyon a relevé une erreur manifeste de droit car si les écoles doctorales peuvent déléguer certaines missions dont le pouvoir réglementaire de mettre en place une politique d’admission à un collège d’études doctorales, le cas d’espèce ne s’inscrit pas dans cette logique faute de délégation de compétence établie. En tout état de cause, l’article 3 du règlement contesté est entaché d’incompétence.
En outre, en fixant un seuil minimal de financement du doctorat, le collège d’études doctorales de l’Université de Grenoble Alpes, a outrepassé son champ de compétence.
L’incompétence du collège d’études doctorales pour fixer un plafond d’encadrement des doctorants
La Cour administrative d’appel de Lyon, a jugé que c’est à bon droit que le Tribunal administratif de Grenoble, a annulé les dispositions du règlement intérieur contestées, relatives au plafonnement du nombre de doctorants pouvant être encadrés par un directeur de thèse, contenu dans l'article 7 du règlement, au motif qu’il a été adopté par une autorité incompétente.
Elle confirme que le collège des études doctorales, toujours en méconnaissance de l'arrêté du 25 mai 2016, a empiété sur les compétences des écoles doctorales en fixant un plafonnement des doctorants, puisqu’il n'était pas compétent pour fixer des règles concernant le nombre de doctorants qu'un directeur de thèse peut encadrer.
En effet, conformément à l’article 16 de l’arrêté du 25 mai 2016, le pouvoir réglementaire d’encadrement des doctorants appartient exclusivement au conseil de l’école doctorale, cette compétence ne peut pas être déléguée.
Le Collège des études doctorales a outrepassé ses compétences en empiétant sur celles des écoles doctorales, comme l’a souligné la Cour administrative d’appel de Lyon.
LA PORTÉE DE L’ARRÊT
Par cette décision, la Cour administrative de Lyon a clarifié la répartition des compétences entre collèges d’études doctorales et écoles doctorales en rappelant que :
1. Les règles relatives au financement doivent respecter les cadres nationaux définis par les arrêtés ministériels, notamment celui du 25 mai 2016 relatif à la formation doctorale.
2. La limitation du nombre de doctorants par encadrant ne peut être imposée de manière unilatérale ou déconnectée des réalités disciplinaires et des capacités d’encadrement, sous peine de porter atteinte à la liberté académique des écoles doctorales.
CE QU’IL FAUT RETENIR
D’une part, cette décision reconnaît la recevabilité des recours juridictionnels formés à l’encontre d’actes internes dès lors que les dispositions de ces actes prévoient des mesures à caractère impératif.
D’autre part, celle-ci rappelle que les universités ne peuvent s’écarter du cadre légal national pour décider arbitrairement de l’organisation et du fonctionnement des doctorats.
En substance, les règles de financement des études doctorales sont fixées à l’échelle nationale, et ne peuvent faire l’objet de restrictions excessives comme en l’espèce. Par ailleurs, sauf en présence d’une délégation statutaire de compétences, ce sont les écoles doctorales qui peuvent exclusivement fixer les conditions d’encadrement des doctorants.
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