
Garde à vue, dignité et droit à l’alimentation
La Cour d'appel de Paris a infirmé une ordonnance prolongeant la rétention administrative d’un étranger en raison d'une violation de ses droits fondamentaux lors de sa garde à vue, notamment le droit à l'alimentation (Cour d'appel de Paris, 19 février 2025, 25/00932).
Suite à cette garde à vue, le demandeur, de nationalité polonaise, a été placé en rétention administrative par le préfet de police. Le 17 février 2025, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris a ordonné la prolongation de sa rétention pour 26 jours supplémentaires.
L’homme a interjeté appel et la problématique soumise à la Cour d’appel était la suivante : le fait d'être privé de proposition d'alimentation entre 14 heures 07 et le lendemain à 13 heures 30 porte-t-il une atteinte substantielle aux droits de l'intéressé ?
En appel, la Cour a rappelé que le respect des droits fondamentaux, y compris le droit à l'alimentation, est essentiel lors d'une privation de liberté. Le juge judiciaire a rappelé qu’il lui appartient, en sa qualité de gardien de la liberté individuelle, de se prononcer sur les irrégularités affectant les procédures préalables à la notification de la décision de placement en rétention. (2e Civ., 28 juin 1995, pourvoi n° 94-50.002, n° 94-50.006, n° 94-50.005). Il est constant que la garde à vue de toute personne doit être effectuée dans le respect des droits fondamentaux, au nombre desquels figure le respect de la dignité des personnes dont résulte le droit de s'alimenter lors d'une privation de liberté. Cela a été rappelé récemment par la décision du Conseil constitutionnel n° 2024-1090 QPC du 28 mai 2024 qui a considéré que les dispositions de la loi ne permettaient pas aux autorités judiciaires de s'assurer que la privation de liberté de l'étranger retenu se déroulée dans des conditions respectueuses de la dignité de la personne humaine ce dont il a résulté les articles 63-5 et 64 du code de procédure pénale relatifs à la garde à vue qui prévoit que les procès-verbaux de garde à vue mentionnent les heures auxquelles la personne a pu s'alimenter.
Il est important de préciser que la durée pendant laquelle le défaut d'alimentation est invoquée ne doit pas s'interpréter abstraitement au regard de la seule durée totale de la mesure en cause, mais doit conduire à apprécier une telle situation au regard des horaires classiques de restauration et de l'importance quantitative de chacun des trois repas rythmant habituellement un cycle quotidien.
En l’espèce, le juge a retenu que : “au cours de la mesure, si la privation de proposition de nourriture sur une période majoritairement nocturne n'est pas de nature à caractériser en soi une atteinte à la dignité de la personne au sens des dispositions précitées, en revanche la privation de proposition de nourriture sur une période de quasiment 24 heures allant d'un temps de déjeuner à un autre temps de déjeuner - soit 2 repas non proposés, qui dépasse largement le temps de repos nocturne, a porté atteinte substantiellement aux droits de l'intéressé.”
Historique
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